Marie-Hélène, lectrice attentive, nous signale qu’on ne saurait traduire le terme anglais library par le français « librairie ». Un sacré faux-ami, ce library ! car en anglais, library, c’est une « bibliothèque » ; et c’est l’anglais bookshop (au Royaume-Uni) ou bookstore (aux États-Unis) qui est l’équivalent de notre « librairie ». Capito ?
Ainsi, quand Donald T. veut effectuer des coupes claires dans la « bureaucracy » états-unienne, ce sont les libraries qu’il cible, et non bien sûr les entreprises privées (privées de quoi ?) que sont les bookstores.
Cette vidéo n’est pas à mettre entre tous les yeux et pourrait choquer les âmes sensibles. Elle montre pourtant une copulation animale pleine de joliesse. Il s’agit sans doute de couleuvres… Elle fut prise il y a quelques jours vers onze heures sur un sentier de randonnée de la Seine-et-Marne dominant la rive droite de la Seine, commune de Chartrettes. Tout à leur affaire, les deux protagonistes n’ont prêté aucune attention à ces hominidés qui les filmaient. Peut-être continuent-ils encore car ces étreintes, ces enroulements qui paraissent ritualisés et sont d’une grande élégance peuvent durer fort longtemps… (avec des pauses, peut-être ?). Ce n’est pas notre première note animalière. Nous avons déjà mis en scène des ânes, ainsi que, récemment, des moutons (et notamment un mouton noir de Bardella). « Faites l’amour, pas la guerre », est un vieux slogan datant de la guerre du Vietnam. Comme le disait Herbert Marcuse, un penseur de cette époque, l’obscénité n’est pas où l’on croit : dans la guerre, pas dans la copulation.
Intéressant article, sur le site de l’INA, au sujet du prix du papier, un gros souci pour les journaux. Le Monde, lui, a trouvé une solution originale face à ce problème, non sans de houleux débats avec les correcteurs : ne plus utiliser les guillemets français (mais la version Web du journal sera épargnée). Lecteurs attentifs et amateurs de typographie, vous le savez, les guillemets français sont séparés du mot ou de la citation qu’ils encadrent par une espace insécable…, ce qui n’est pas le cas des guillemets anglais, collés au mot ou à la citation*. Exemple :
« cacao », le mot est encadré par des guillemets dits français “cacao”, le mot est encadré par des guillemets dits anglais.
Non-amateurs, vous l’aurez sans doute compris : les guill’ français prennent plus de place dans un article que les guill’ anglais, d’où le projet (bientôt mis en application) du Monde de ne plus employer ceux que l’on appelle également « doubles chevrons », qui par ailleurs (et c’est un autre inconvénient) semblent faire une publicité cachée à une grande marque d’automobiles française.
Traditionnellement, en typographie française, une citation s’ouvre et se ferme par des guill’-chevrons, et une citation à l’intérieur d’une citation est, elle, encadrée par des guill’ anglais. Exemple avec cette phrase énigmatiquement poétique trouvée sur le Ouèbe :
« Le vif zéphyr s’écria : “Portez ce vieux whisky au juge”, et il s’en retourna à ses jattes de kiwis. »
C’est ainsi que pratiquait Le Monde. Aussi, comment fera désormais le journal ? C’est très simple : puisque les guill’ anglais encadreront les citations, la citation à l’intérieur d’une citation sera, elle, encadrée par des guillemets non pas doubles, comme ceci “, mais simple, comme ceci ‘, un signe qui ressemble à une apostrophe inversée.
Afin de faire encore plus d’économie de papier, « Le Monde » adoptera-t-il un jour totalement la typo’ anglaise, qui, comme vous le voyez sur cette vidéo, n’aime guère les espaces ?
On peut regretter amèrement – même pour une noble cause économique – cette défaite française, une de plus, mais remarquez tout de même, lecteurs du Monde, que les guillemets anglais que vous verrez bientôt exclusivement dans votre journal n’ont pas la froideur des guillemets dits « machine »,
mais au contraire cette agréable courbe qui fait tout le charme de ces signes et les rapproche de leur cousine, l’apostrophe. Ainsi la défaite n’est-elle pas totale.
Chaque mois, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France nous envoie sa Lettre d’information, « La langue s’enrichit », trace des travaux de la CELF (Commission d’enrichissement non pas personnel mais de la langue française). Ainsi, au mois de mars, il était notamment question dans la Lettre de nouveaux mots dans le vocabulaire de l’agriculture,
dans celui de l’environnement, où vous pourrez notamment découvrir une merveilleuse locution : réserve de ciel étoilé.
Toujours introduites avec délicatesse, ces infos, et poésie également, comme ici :
« Il est grand temps de rallumer les étoiles », suggérait le poète : c’est chose faite dans le parc naturel régional des Landes de Gascogne, qui vient d’être officiellement reconnu “réserve internationale de ciel étoilé” – un label attribué à seulement 22 sites dans le monde dont 6, désormais, en France.
… suggérait le poète… Quel poète ? l’Apollon lunaire, Apollinaire, ici en pleine discussion
Le 2 août 1914, Guillaume Apollinaire (à gauche) et le dessinateur André Rouveyre, qui, après un reportage à Deauville pour la revue « Comœdia », viennent de rentrer à Paris à l’annonce de la mobilisation. Ils se rendent dans une boutique Biofix, boulevard Poissonnière, où l’on enregistre de petits films-souvenirs sur le principe des Photomaton – Animation de Bernard de Go Mars d’après les images d’un FlipBook montrant Apollinaire et André Rouveyre en 1914
La CELF ? une compagnie extrêmement ludique de la langue française !
Il y a peu, Arte nous a donné à voir Thelma et Louise, film de Ridley Scott, toujours visible en replay. Les deux protagonistes de ce road movie à travers les USA sorti en 1991 sont des femmes (Geena Davis et Susan Sarandon), ce qui en fait sa grande originalité. La gent masculine y montre piètre figure, si l’on excepte le flic humaniste qui les traque et qui a compris leurs motivations. Ces deux femmes y incarnent l’humanité vivante contre ce qui l’empêche de vivre. La critique du Monde (22 mai 1991), sous le titre La cavale fantastique (référence évidente à un autre film), déclarait dans son chapô : « Deux femmes plus fortes que le monde des hommes. Deux comédiennes épatantes », etc. D’autres critiques de l’époque parlent de sa totale originalité (pensez-vous, une femme qui conduit, alors que sa place est sur le siège passager), ce qui est erroné. Car il existe un film qui le précède de douze ans avec presque la même thématique. Nous voulons parler de Messidor, d’Alain Tanner, sorti en 1979 (image ci-dessus), qui met en scène deux jeunes femmes (jouées par Clémentine Amouroux et Catherine Rétoré) en rupture de ban qui se rencontrent en faisant du stop sur les routes suisses et s’embarquent elles aussi pour une cavale fantastique et néanmoins helvétique. Messidor, le mois des moissons du calendrier révolutionnaire, étant le patronyme que s’invente l’une d’elles. La critique du Monde (15 mars 1979), sous le titre La révolution cachée, déclarait notamment : « Une simple escapade, des vacances imprévues, deviennent progressivement une confrontation avec l’ordre établi. Une logique rigoureuse rend les deux jeunes femmes, petit à petit, prisonnières d’un ensemble de circonstances, de rencontres, de paysages, sans espoir de retour en arrière, à l’ordre dit normal. Du voyage, de la fable, nous passons à la parabole, au destin de deux êtres jeunes dans une société qui broie quiconque ne se plie pas à la loi commune. » Cette phrase pourrait s’appliquer au film de Ridley Scott. Mais les deux « êtres jeunes » sont des femmes, ce sur quoi la critique n’insiste pas. A noter que Messidor n’est visible sur Internet qu’en version russe, ou alors par bribes sur des sites pornographiques, alors qu’il est à mille lieues du porno. Nous espérons vous avoir donné l’envie de découvrir (ou redécouvrir) ces deux films marquants.
Recevant régulièrement le programme de la BPI, Bibliothèque publique d’information, en ce qui concerne la Cinémathèque du documentaire, celle-ci annonce que le 5 avril, à 19 h 30, au Forum des images, s’ouvrira le cycle « Si la Bulgarie m’était contée », en association avec l’Institut culturel bulgare. Georges et les papillons sera le premier film présenté.
Hasard des jours, je vais visiter récemment ma libraire préférée, Patricia Menay, dans son charmant lieu du 18e arrondissement parisien. Le quartier, au bord de la place des Abbesses, grouille sans cesse de touristes grimpant vers la honteuse pièce montée qui déshonore Paname. Et bien des fois, passant par la rue Ravignan, où se trouve la librairie qui n’a toujours pas retrouvé son enseigne (Anima), certains, se contentant de rester sur le trottoir, prennent en main leur téléphone chasseur de photos et « clic », par la porte ouverte, face aux collines de livres qui sont la géographie du lieu. Le pittoresque parisien, raconteront-ils peut-être.
Me baladant entre les collines de livres, voilà mes yeux attirés par une douce couverture
Comme il est tendre, cet ours aux yeux clos, dessiné par Kiril Zlatkov, accompagné pour les textes par Zornitsa Hristova, tous deux… bulgares. Et n’oublions pas la traductrice de Quand je garde le silence : Marie Vrinat-Nikolov.
Le livre est publié par les éditions nantaises pour la jeunesse Six citrons acides qui sont, ces Citrons, entre les mains de deux femmes, Marie Rébulard, l’éditrice, et une linguiste, Sophie Hamon. La linguiste collabore, lit-on sur le site des Citrons, avec la bibliothèque numérique Mobidys, qui conçoit des livres accessible au public dys. Dys ? pour troubles spécifiques du langage et des apprentissages
Rue des Pyrénées (Paris 20e), il est un magasin de presse bien connu à Belleville
« Fée Carabine »… on l’aura compris, est un hommage à Daniel Pennac qui habite le quartier et fréquenta longtemps régulièrement la « Fée ». Qui tient cette librairie-papeterie-photocopie (en fait, pas de photocopieuse)-presse ? M’Hamed Azzouz. Et qui ne connaît Azzouz (oui, on l’appelle couramment par son nom) à Belleville !
Justement, je ne le connaissais pas, mais plusieurs amis m’avaient parlé de lui, alors je suis venue lui rendre visite… à propos de la nouvelle enseigne « presse » dont nous avons parlé récemment dans LSP. Azzouz n’était pas au courant de cette terne innovation, alors je lui montre une photo de l’objet. Réponse : « Ils sont à côté de la plaque… »
Azzouz, qui a repris la boutique voilà plus de trente-cinq ans, me dit qu’elle a été ouverte en… 1905. La porte du magasin est du genre difficile à ouvrir, mais ça vaut le coup de pousser fortement, car on entre alors dans un joyeux et poétique bazar
« Quand je suis arrivé dans le quartier, me raconte Azzouz, il y avait quatorze marchands de journaux tout autour. » Alors évidemment ce marchand de journaux-là attire les regards : il a eu les honneurs de L’Huma’ , de La Croix , de Paris vous aime, le magazine des Aéroports de Paris. Une journaliste allemande alors correspondante du TAZ à Paname, Dorothea Hahn, est également venue lui rendre visite.
Azzouz me montre aussi un article paru dans Quinzaines (ex-Quinzaine littéraire)
Sur un tas de journaux, encore un article de Quinzaines, mais cette fois sur un autre (ancien) marchand de journaux, Jean Rouaud, qui tint un kiosque durant sept ans rue de Flandre, dans le 19e
Tandis que nous discutons, une habituée passe apporter quelques gourmandises au marchand de journaux… Azzouz me dit qu’il a fréquenté « l’école des libraires », Asphodèle, c’est l’orthographe que j’imagine tant ce nom m’apparaît délicieux. Mais cherchant sur le Ouèbe, je ne trouve rien… Et pour cause, il fallait comprendre l’acronyme… Asfodel
asphodèle, colibri rubis-topaze et papillon machaon – dessin de Johann Walter, 1604-1677 – document Gallica
Un homme luttant pour ouvrir la porte vient demander : « Vous avez L’Écran fantastique ? » Beaucoup de choses dans la boutique, mais pas ce mensuel. En revanche, sous son bonnet couleur d’automne que l’on aimerait parsemé d’asphodèles, il y a un homme affable, et qui aime le rouge et le noir… sur fond jaune.
Une certaine dylanmania se développe depuis le biopic consacré au grand Bob. Sur YouTube, des dizaines de documentaires dylaniens vous attendent, centrés surtout sur sa première période, des sixties, la seule intéressante selon nous, qui se clôt avec l’insipide double album Planet Waves. Beaucoup y est dit sur son passage contesté de l’acoustique à l’électrique. Moins sur ses chansons « contre » (le racisme et surtout l’industrie de guerre). Nous pensons notamment à Masters of war (maîtres de guerre) plus qu’aux autres chansons dont un critique de Rock & Folk avait dit très justement qu’elles relevaient d’un « messianisme petit-bourgeois » creux (When the ship comes in – le jour où le bateau viendra). Cette dylanmania se développe en même temps que la pesante propagande militariste que nous connaissons actuellement. Macron nous avait dit qu’il n’y avait pas d’argent magique pour les hôpitaux, mais apparemment pour les canons, il y en a. La presse a abondamment relayé la joie puérile du dirigeant d’un de ces masters of war, Rheinmetall, qui fabrique des tanks, des canons et les obus qui vont avec : « Une ère de réarmement a commencé en Europe, qui va nous demander à tous beaucoup d’efforts. Mais elle nous apporte aussi des perspectives de croissance pour les années à venir, comme nous n’en avons jamais connu auparavant. » Ah ! Dieu que la guerre sera belle. Et on imagine aussi à qui l’on demandera en priorité les « efforts ». En France, nous avions notre petit Dylan, Antoine, qui lui aussi chanta contre les marchands de canons. Nous pensons à Pourquoi ces canons, au bruit étonnant ?Pour faire la guerre, mon enfant. Maintenant, tout ce qui a pignon sur rue nous chante une tout autre chanson : Encore plus de canons !
L’image ci-dessus est la reproduction d’une affiche de Mai 68.
Terme étrange que refuznik (nous choisissons cette orthographe). Selon le dictionnaire Robert (édition 2020), ce mot à consonance russe est formé sur le verbe anglais to refuse et le suffixe russe d’agent -nik. Mais il n’est pas russe, plutôt international, car le terme russe précis est : otkaznik. Il a d’abord désigné dans les années 1980 les Juifs soviétiques à qui le droit d’émigrer était refusé. Puis, le terme s’est retourné pour désigner les citoyens soviétiques qui refusaient tel ou tel aspect de la politique du pouvoir (l’invasion de l’Afghanistan par exemple). Le refus était passé des autorités à leurs sujets. Curieusement, ni le Robert ni le Larousse n’évoquent cette évolution. Dictionnaires, vous êtes bien souvent à la traîne : et pourtant vous sortez une nouvelle édition chaque année ! Désormais, refuznik est employé au sens large pour désigner des gens qui refusent, notamment les jeunes Israéliennes et Israéliens qui refusent de faire le service militaire (trois ans pour les hommes, deux pour les femmes). Ce ne sont pas vraiment des objecteurs de conscience, comme on le dit souvent, car ils ne refusent pas forcément de porter les armes, mais précisément la politique qu’ils seraient chargés d’appliquer s’ils étaient intégrés à l’armée. Ils (et elles) sont peu nombreux, considérés souvent comme des « traitres » menacés et vilipendés, et parlent de leurs « frères palestiniens », comme ceux qui sont actuellement en tournée au Canada. Évidemment, il est difficile de les traiter d’antisémites… Une émission récente de France 24 (6 janvier) donne la parole à certaines et certains d’entre eux, sous le titre : « Ils disent non au service militaire ». Elles aussi.
Voici une affiche de pub’ pour un site de rencontres photographiée dans le métro parisien
On y remarque que si la Côte (pour Côte d’Azur*) prend bien une capitale, il n’en est rien pour « parisien », ce qui devrait pourtant être le cas puisqu’il est ici question d’un habitant de Paris.
Ou bien, faut-il comprendre que l’amoureuse s’est éprise d’un pain parisien, ou parisien tout court, que l’on peut aussi appeler une baguette, de forme allongée (sur le sable de la Côte) et à la croustillante croûte ?
Quant aux surnoms des côtes en France, attardons-nous un instant sur eux : la Côte d’Azur, la seule qui symbolise sans précision, absolument, les vacances, le ciel bleu, le surtourisme et les yachts
Remarquez aussi que si la publicité pour l’amoureuse du pain est avare de capitales, il en va tout autrement pour les surnoms des côtes françaises, des personnages géographiques !